Il a dormi sur les mains.
Sur un rocher.
Sur ses pieds.
Sur les pieds de quelqu’un d’autre.
Il a dormi dans des bus, des trains, des avions.
Dormi pendant le service.
Dormi au bord de la route.
Dormi sur un sac de pommes.
Il a dormi dans une sanisette.
Dans un grenier à foin.
Au Super Dome.
Dormi dans une Jaguar et sur la plate-forme d’un pick-up.
Dormi au théâtre.
En prison.
Sur des bateaux.
Il a dormi dans des baraquements et, une fois, dans un château.
Dormi sous la pluie.
Sous un soleil ardent il a dormi.
A cheval.
Il a dormi sur des chaises, dans des églises, des hôtels de luxe.
Il a dormi sous des toits étrangers toute sa vie.
Maintenant il dort sous la terre.
Il n’en finit pas de dormir.
Comme un vieux roi.
*
He slept on his hands.
On a rock.
On his feet.
On someone else’s feet.
He slept on buses, trains, in airplanes.
Slept on duty.
Slept beside the road.
Slept on a sack of apples.
He slept in a pay toilet.
In a hayloft.
In the Super Dome.
Slept in a Jaguar, and in the back of a pickup.
Slept in theaters.
In jail.
On boats.
He slept in line shacks and, once, in a castle.
Slept in the rain.
In blistering sun he slept.
On horseback.
He slept in chairs, churches, in fancy hotels.
He slept under strange roofs all his life.
Now he sleeps under the earth.
Sleeps on and on.
Like an old king.
Raymond Carver (1938-1988), La vitesse foudroyante du passé (Ultramarine, 1986) – Traduit de l’anglais (États-Unis) par Emmanuel Moses.